Vivre une vie «spirituelle»
Source:http://glory2godforallthings.com/2013/02/26/living-a-spiritual-life/
C’est devenu un lieu commun d’entendre quelqu’un dire: «Je suis spirituel, mais pas religieux ». La plupart des gens comprennent cette phrase de façon très générale. Je pense que le plus souvent les gens adhèrent à des idées qui sont considérées comme «spirituelles» dans notre culture, mais qu’ils ne sont pas particulièrement intéressés par « la religion institutionnelle ». Je peux comprendre cela, parce que la religion organisée peut souvent être un obstacle à la vie spirituelle .
Je suis un chrétien orthodoxe – ce qui n’est pas la même chose que de dire que j’ai un intérêt pour la religion organisée (institutionnelle). Il y aurait beaucoup à dire sur la religion institutionnelle et sur des aspects que je n’aime pas du tout, et il m’arrive de voir son ombre s’infiltrer dans mon expérience au sein de l’Orthodoxie . Mais je le répète sans honte que je suis un chrétien orthodoxe et je dois admettre que je ne suis pas très «spirituel». Sans la vie de l’Eglise et sa Tradition – Je pourrais facilement dériver vers une laïcité informe – vivre une existence médiocre, traverser le temps jusqu’à la fin de mon existence.
Les contours indéterminés de la spiritualité reflètent souvent rien de plus que notre ego. Comment puis-je échapper aux limites de ma propre imagination? Il est, bien sûr, possible d’ignorer la question de l’ego et se satisfaire de ce que nous nous trouvons à l’aise avec notre «spiritualité». Mais, comme je l’ai déjà indiqué, je ne pense pas que je suis un homme foncièrement «spirituel».
L’Eglise est spirituelle – en fait elle est beaucoup plus spirituelle qu’institutionnelle. Elle se tient au milieu de ce qui est Saint (que j’en sois conscient ou non) et moi-même je me livre à cette réalité qui constitue en grande partie mon quotidien « organisé ». Je prie et quand quelque chose attire mon cœur, je m’arrête et y reste pendant un certain temps.
Dans les premières années de ma vie, alors que j’étais un anglican, j’ai appris un phénomène connu sous le nom liturgique de « secret coupable ». Cela fait référence à l’extrême familiarité qui grandit entre le prêtre et les «choses saintes ». Les choses saintes deviennent facilement monnaie courante et leur traitement dangereusement désinvolte. Plus dangereux encore, c’est le sentiment croissant d’une absence dans le cœur d’un prêtre et alors ce qui est saint devient banal et même simplement « commun ». Bien sûr, les choses que Dieu a marquées comme « saintes » sont « communes ». Un calice est saint bien qu’’il ne s’agisse que d’argent ou d’or (des matériaux « communs »). Dieu utilise les choses communes dans le don de la grâce.
Le « secret coupable» peut frapper n’importe qui. C’est le vieil adage, « La familiarité engendre le mépris ». Cela est particulièrement dangereux à cause de notre culture laïque qui tient la plupart des choses (objets) dans un égal dédain. Les choses sont seulement des objets au sein de notre culture, et la valeur qu’elles pourraient avoir est imputée et non intrinsèque.
Ce problème est pareil pour la «spiritualité». Les mots ne sont que de simples mots, les actes sont des actions simples, et les idées des bulles vaporeuses vides. J’ai écrit ailleurs que la sécularisation nourrit l’athéisme. Le « secret coupable » qui nous guette n’est rien d’autre que la voix qui murmure en provenance de la sécularisation et qui dit, « Il n’y a rien ni personne là-bas. »
La vie que nous sommes appelés à vivre en tant que chrétiens n’est pas une longue discussion avec la voix de la sécularisation. Cette voix n’est pas celle de notre propre doute, mais la voix du malin. Il a toujours été un menteur.
La question essentielle pour nous est clairement indiquée par saint Jean:
A ceci vous reconnaissez l’Esprit de Dieu: tout esprit qui confesse Jésus-Christ venu dans la chair est de Dieu, et tout esprit qui ne confesse pas que Jésus-Christ est venu dans la chair n’est pas de Dieu ; c’est l’esprit de l’Antichrist, dont vous avez entendu annoncer qu’il vient, et dès maintenant il est dans le monde. (1 Jean 4:2-3)
Il s’agit de la question de l’incarnation du Christ – mais, à son tour, il y a aussi la question: « Est-ce que la chair est capable de supporter l’Esprit? » Vivons-nous dans un monde qui est capable de Dieu? Il y a beaucoup de gens qui adhèrent à l’esprit semi-gnostique au sein de la laïcité moderne et qui ne sont pas à l’aise à l’idée que la chair puisse porter l’Esprit. Le Christ est quelqu’un que nous avons clôturé, délimité comme un événement unique tel que Lui seul porte l’Esprit. Il est le Dieu qui s’est incarné dans un monde qui est, par nature, séculier (laïque) .Son incarnation serait donc un signe qui ne confirme pas le monde en aucune façon, mais par sa venue même condamne toute chair. Et c’est justement cela qui, selon Saint-Jean, est l’esprit de l’Antichrist. C’est comme si le diable avait dit: «Très bien. Prends la chair de cet enfant né de Marie, mais tout le reste est à moi, et ne se tournera vers rien. »
Le Christ incarné n’est pas seulement Dieu avec nous, mais révèle la vraie raison de toute la création. «Le ciel et la terre sont remplis de ta gloire » .Il n’y a rien qui ne soit qu’une chose banale.Tout porte à la gloire de Dieu.
Ainsi, ma «spiritualité» est d’apprendre à vivre dans un monde matériel qui est partout bien plus que je ne peux voir ou savoir. Pour une telle vie, j’ai besoin d’un guide. Sans un guide, je me retrouve conduit par ma propre imagination(…) Ce guide est la vie de l’Église, le chemin vers la connaissance et qui se manifeste dans la vie des saints et qui m’a enseigné comment vivre. A prendre la nourriture (ou ne pas en prendre) d’une manière qui révèle Dieu. A m’apprendre comment lire, à honorer les icônes, à pardonner les ennemis, à contempler la création donnée par Dieu à sa juste place. Je suis un chrétien orthodoxe. Qui d’autre se souvient de la façon de vivre dans le monde, estimant que le Christ est venu dans la chair?
Fr Stephen